Se parler à voix haute : un moyen d’améliorer l’intelligence

Parler tout seul, signe de folie ou d’intelligence ? Selon des études récentes, cette habitude pourrait être un puissant outil de contrôle cognitif, améliorant nos performances.
Pendant la crise du Covid-19, de nombreuses personnes isolées ont commencé à verbaliser leurs pensées à voix haute. Cette pratique, loin d’être un signe de trouble mental, est naturelle et bénéfique, selon Paloma Mari-Beffa, chercheuse et professeure de psychologie à l’Université de Bangor. Mais pourquoi cette conversation intérieure devient-elle parfois audible, et quels sont ses bienfaits ?
Comment le cerveau réagit-il lorsque l’on parle à voix haute ?
Se parler à voix haute active un réseau cérébral spécifique, capable de structurer nos pensées les plus désordonnées. Cette activité cérébrale aide à organiser les idées, souvent chaotiques, issues d’autres zones du cerveau.
Une étude menée par des chercheurs de l’Université de Bangor au Royaume-Uni a montré que lire des instructions à voix haute améliorait nettement la concentration et la performance des participants. Lors d’un test, ceux-ci avaient reçu une liste de tâches à accomplir. Ceux qui verbalisaient les consignes à haute voix obtenaient de meilleurs résultats.
« Nos résultats ont démontré que, si nous nous parlons pour prendre le contrôle lors de tâches difficiles, les performances s’améliorent considérablement lorsque nous le faisons à voix haute », explique Paloma Mari-Beffa, co-auteure de l’étude, dans un communiqué.
Ce phénomène est bien connu chez les sportifs de haut niveau. Lors de moments critiques, ils se donnent des instructions ou des encouragements à voix haute, renforçant ainsi leur concentration et leur efficacité. Cette pratique, loin d’être anodine, agit comme un outil puissant pour mobiliser les ressources du cerveau.
Parler à soi-même à voix haute : est-ce bénéfique ?
Se parler à voix haute ne se limite pas à organiser nos pensées : cette pratique offre bien d’autres avantages ! Des chercheurs britanniques ont découvert que les instructions verbales influencent davantage notre comportement que les consignes écrites.
Pourquoi ? Le stimulus auditif active des mécanismes sensoriels qui facilitent la mémorisation. En prononçant un mot, notre cerveau crée une association plus forte entre le mot et l’action ou l’objet qu’il désigne, rendant cette information plus accessible et concrète. Une véritable aide pour mieux se concentrer et agir efficacement !
L’activation simultanée de plusieurs zones cérébrales serait au cœur des bénéfices liés au fait de se parler à voix haute. Une étude menée par des chercheurs de l’Institut Max Planck en Allemagne a comparé l’activité cérébrale des primates et des humains face à différentes tâches.
Chez les primates, seule la région visuelle ou auditive s’active en fonction de la nature de la tâche. En revanche, chez les humains, ces deux régions s’activent simultanément, quel que soit le contexte. Pour approfondir cette observation, les scientifiques ont demandé à des participants de réaliser des tâches tout en émettant des sons dépourvus de sens. Résultat : leur activité cérébrale a imité celle des primates, n’activant que la région visuelle lorsqu’ils se concentraient sur la tâche, sans l’intervention de leur « voix intérieure ».
Se parler à voix haute serait égalament un moyen efficace de réguler son comportement et d’améliorer son bien-être, en particulier lors d’introspections profondes. Une étude de l’Université du Michigan aux États-Unis souligne que s’adresser à soi-même en utilisant son propre nom ou des pronoms à la troisième personne, plutôt qu’à la première personne, permettrait de créer une distance émotionnelle bénéfique. Cette technique aiderait à réduire le stress, atténuer l’anxiété et renforcer l’estime de soi.
Les recherches sur cette pratique montrent qu’elle favorise la concentration, améliore la maîtrise des tâches, stimule la mémoire, clarifie les objectifs et facilite la gestion des défis complexes. Avec autant d’avantages, il est temps de revoir notre perception et de cesser de considérer cette habitude comme anormale ou négative.